jueves, 15 de octubre de 2015

En Songe


C’est le soir. Une faible lumière se glisse à travers les vitres, l’obscurité commence doucement à s’emparer des objets, à les rendre plus vagues.  Monsieur H se  trouve tout seul à la maison; une insolite agitation, qui lui empêche presque de tenir son souffle, vient le frapper en se considérant maître absolu de son temps. Tout le monde est sorti; Madame H séjourne dans un balnéaire où elle suit l’un de ses éternels  régimes d’amaigrissement, jusqu’à la semaine suivante; les enfants, quelque part sur la Côte D’Azur chez des potes; même le chat qui on entend désespérément  miauler juché, à croire pour la netteté de sa lamentation, sur n’importe quel toit proche du voisinage, s’est éclipsé.
En profitant les ombres, Monsieur H se sert un peu de Calvados, met dans le CD le dernier album de Daniel Mille et s’installe confortablement dans son fauteuil préféré, prêt à se plonger dans la mélodie; tout de suite, un harmonieux son d’accordéon envahit la salle tandis qu’il ferme les yeux, une expression détendue sur son visage. « Enfin seul! » Se dit-il. Des minutes à peine coulés, lorsqu’un lourd assoupissement arrive à accompagner indulgent son repos -la musique exerçait, parfois, cet effet chez lui-, et il s’abandonne soumis à ses griffes…


Le matin, quand il allait explorer avec ses petits frères la surface des eaux chaudes, Nethou était ravi. Il remuait sans arrêt sa nageoire caudale: étroite, rigide, et badinait en poussant ses compagnons de jeux jusqu’à les agacer. Nethou était tellement hardi, que même il s’aventurait souvent à franchir la zone limite, malgré l’interdiction catégorique de son père, qui l’avait sérieusement averti des actions humaines. Il aimait, surtout, se diriger vers les rochers chargés de crevettes où il prenait, avec gourmandise, son petit-déjeuner.
Un jour où l’eau était teintée d’une nuance de grisaille, Nethou aperçut au loin un drôle de truc qui attira immédiatement son attention. Il s’agissait d’une sorte d’énorme radeaux  émettant un son aigu. Il s’approcha et remarqua,  là dedans, quelques requins, des tortues, des cabillauds, de nombreux crustacés et de petits poissons, même un thon, cousin lointain à lui, qui mangeaient avidement un plancton, à ce qui paraissait exquis. Nethou se faufila par l’un des trous de l’engin, et s’achemina saluer son parent.


Minuit passé, Monsieur H se réveille en sursaut, les membres engourdis et un étrange goût de végétaux dans la bouche. Une faim de loup lui déchire l’estomac. Il file vers la cuisine et ouvre le frigo; une succulente assiette de sushi au thon rouge  l’y attend. Attablé, Monsieur H se dispose à savourer ce délicieux mets, il est sur le point d’en avaler un morceau, quand le rêve qu’il vient de faire  se fixe carrément dans sa tête. « C’était moi! Dans mon rêve,  Nethou, c’était moi !», se dit-il bouleversé,  en même temps qu’il éprouve un grand mal au cœur et il court hâtif vers la salle de bain.


                                                                       Teresa Cortés
                                                                        
                                                                         17-02-2015


No hay comentarios: